Coup de tonnerre sur la Ligue 1 ? Le cap de la mi-championnat a été franchi il y a plusieurs semaines de cela et pourtant, le Stade Brestois 29 figure toujours à la proue. Le club breton n’a jamais passé un jour en dehors de la première moitié de tableau cette saison et s’accroche désormais à la 3e place du podium depuis son succès contre le Montpellier HSC, le 14 janvier (2-0). Le SB29 compte 35 points après 19 matchs en 2023/24, lui qui n’avait jamais atteint les 30 à ce stade lors de ses 17 précédentes participations à l’élite. Les derniers ayant vogué au moins à ce rythme n’ont pas fini au-delà de la 6e place, un résultat qui serait synonyme de toute première qualification européenne pour une formation dont le meilleur classement final à ce jour est une 8e place en 1986/87.
Une équipe « rentre-dedans » Hugo Magnetti l’a dit sans ambages en interview : « Ce qu’[Eric Roy] nous répète beaucoup, c’est qu’il faut que l’on soit une équipe chiante à jouer ». Dans les faits, comment cela se traduit-il ? Les joueurs brestois vont au contact de leurs adversaires, étant l’équipe des 5 grands championnats européens qui dispute le plus de duels par match (119) et surtout qui en remporte le plus (61, au moins 3 de plus qui quiconque). Contrairement aux préjugés qu’on peut avoir sur des équipes habituées à jouer le maintien, le SB29 ne craint pas de s’aventurer et de presser haut comme en témoigne ses 184 récupérations hautes en Ligue 1 2023/24 – seul l’AS Monaco en compte davantage (187).
Autre indicateur qui montre les nouvelles ambitions brestoises : la possession. Le Stade Brestois 29 affiche une moyenne de 53.4% en Ligue 1 cette saison, alors qu’il n’avait jamais dépassé les 50% de possession lors de ses 7 autres exercices disputés au 21e siècle. C’est dans cet état d’esprit que le club breton a réussi à contenir le Paris Saint-Germain en clôture de la 19e journée (2-2 après avoir été mené 0-2 à la mi-temps). Les hommes d’Éric Roy n’ont pas eu la possession (46.1%) mais restent ceux qui ont eu le pourcentage le plus élevé en déplacement au Parc des Princes toutes compétitions confondues. « Cette saison, on essaye de ne jamais s’affoler, même dans les temps faibles », confirme Hugo Magnetti
Cette approche plus décomplexée du Stade Brestois n’empêche pas de continuer à s’appuyer sur le jeu aérien, force du collectif finistérien depuis plusieurs saisons en Ligue 1. Brest est l’équipe qui tente le plus de centres dans le jeu (338), ainsi que celle avec le plus de tirs de la tête (55) dans l’élite en 2023/24. Les Ty-Zefs cherchent à mettre rapidement la pression dans la surface adverse. Plusieurs grands gabarits peuvent être à la réception du centre pour tirer ou décaler un partenaire à l’image de Le Douaron, Satriano et surtout Mounié. À défaut, ces derniers vont essayer de contraindre la défense adverse à mal renvoyer le ballon, de façon à offrir une seconde chance via les milieux qui prennent davantage d’initiatives à l’image d’un Kamory Doumbia, auteur d’un quadruplé contre le FC Lorient en clôture de la phase aller.
Si Doumbia et consorts peuvent prendre des risques dans le dernier tiers, c’est aussi parce qu’ils peuvent compter sur l’immense travail défensif abattu par Pierre Lees-Melou au centre du terrain. L’ancien niçois est le joueur qui a effectué le plus d’actions défensives en Ligue 1 cette saison (235). Cette donnée correspond au cumul des tacles, des dégagements, des interceptions, des fautes concédées et des passes/tirs bloqué(e)s. La plupart de ces actions défensives sont éloignées du rond central, montrant que Pierre Lees-Melou s’active à compenser dans les espaces délaissés. Travail qu’il accomplit avec brio car il est le seul joueur ayant récupéré plus de 150 ballons dans l’élite en 2023/24 (183).
Le milieu brestois, qui évoluait un peu plus haut sur le terrain lors de ses premières années en Ligue 1, ne se contente pas de faire le sale boulot derrière, il participe activement à la construction du jeu. Il est impliqué dans 77 séquences dans le jeu s’achevant par un tir en 2023/24, seuls les Parisiens Vitinha et Warren Zaïre-Emery font mieux à son poste.
D’ailleurs dans ce domaine, un autre joueur de la Rade se distingue, il s’agit de Romain Del Castillo, le premier non-parisien du classement toutes positions confondues avec 89 implications (8 s’achevant par un but). L’ancien joueur de Rennes a pleinement pris la succession de Franck Honorat, parti en Bundesliga, en devenant le catalyseur de l’attaque brestoise. Il est ainsi 1er du championnat en matière de dribbles réussis (56) et de centres trouvant un partenaire (46), 2e en duels gagnés (133) – derrière Bradley Locko (143) – et 3e en fautes subies (39).
La grande force du Stade Brestois cette saison, c’est de savoir partir à l’abordage tout en gardant son sang-froid. « Ce que l’on fait cette saison, je pense que l’on savait le faire l’année dernière, assure Hugo Magnetti. Mais avant, on ne voulait pas prendre le risque de perdre des matchs en se prenant des contres. » Le fait d’avoir pris le large sur la zone rouge aide à se libérer et le management d’Éric Roy permet de ne pas tomber dans la suffisance. Brest sait qu’il doit encore batailler pour chaque point, il a d’ailleurs été plus longtemps mené au score (462 minutes) qu’il n’a été devant au tableau d’affichage (427 minutes), un delta négatif comparable à des équipes de seconde moitié de tableau comme le FC Nantes ou le Toulouse FC.
Communication compréhensible dans ce cas de figure, les Finistériens gardent les pieds sur terre en ne parlant encore que de maintien, mais ils sont néanmoins crédités de 81% de chances de se qualifier pour une compétition européenne au terme de la saison, selon le modèle prédictif d’Opta. Avec 4 rencontres contre des concurrents directs au cours des 7 prochaines journées (OGC Nice, OM, RC Lens & LOSC), les Ty-Zefs sauront avant le printemps vers quel horizon se tourner.