Interview

Khalid Boutaïb : « Je ne suis plus dans le délire de marquer à tout prix »

Toujours aussi redoutable à 37 ans, l’attaquant Khalid Boutaïb s’exprime longuement sur sa longévité en Ligue 2 BKT, de l’évolution de son jeu à son rapport au but en passant par son rôle de grand frère. Un entretien de zinzin avec le « zinzin » du Pau FC.
Publié le 05/11/2024 à 13:00
18 min de lecture
A 37 ans, Khalid Boutaïb continue de poser des problèmes aux défenseurs de Ligue 2 BKT.

Tu continues de faire trembler les filets en ce début de saison (4 buts en 12 matchs de Ligue 2 BKT). À 37 ans, comment fais-tu pour conserver cette régularité ?
Je suis bien accompagné sur le terrain (sourire) ! Quand on regarde les buts que j’inscris, je suis à chaque fois mis dans les meilleures conditions par mes partenaires. Le plus dur est déjà fait. Après, j’essaie de compenser le poids des années par mes facultés à savoir bien me déplacer et à lire le jeu. J’ai fait évoluer mon jeu au fur et à mesure du temps.

Est-ce que le secret de ta longévité réside dans ton hygiène de vie ?
Je pense que c’est avant tout lié au fait d’avoir débuté ma carrière pro sur le tard (il a signé son premier contrat à 27 ans). Mon organisme est peut-être moins usé que celui d’un joueur qui répète les gammes depuis sa jeunesse. Je n’ai pas été sursollicité dès mon adolescence. Je pense que ça a été un mal pour un bien. Après, je suis beaucoup en soins, je m’entretiens un minimum, et même si je ne fais pas tout parfaitement, je fais attention à mon corps. Plus que par le passé !

C’est-à-dire ?
Avant, j’étais en freestyle ! Je m’entraînais, je jouais et je ne me prenais pas la tête avec le reste. J’essayais d’aller le moins possible chez le kiné. Je ne calculais pas forcément les soins annexes.

« Dès que je ressens une petite douleur, au lieu de me dire qu’elle va passer avec le temps comme je le faisais plus jeune, je vais directement consulter le kiné »


Aujourd’hui, as-tu mis en place une certaine routine indispensable ?
Pas spécialement ! Je sollicite le kiné tous les jours, car je sens que j’en ai besoin, mais je n’ai pas de routine particulière. Ce qui a changé, c’est que dès que je ressens une petite douleur, au lieu de me dire qu’elle va passer avec le temps comme je le faisais plus jeune, je vais directement consulter le kiné. Ça ne me dérange pas de passer toute la journée au club.

Es-tu également plus prudent lors des séances d’entraînement ? 
Oui. Avec le coach et le préparateur physique, on fait très attention à ma gestion la semaine. On sait que le plus important, c’est d’être en forme le jour du match. Il ne faut pas que j’arrive à court de forme ou cramé, donc ma gestion est un peu différente des autres. Après, je n’aime pas trop me dispenser moi-même d’un exercice, c’est souvent le coach qui voit que je suis moins bien et qui n’hésite pas à me préserver. 

Comment cela se matérialise ?
C’est simple : le coach n’a aucun souci à me faire quitter une séance plus tôt. J’ai la chance de travailler avec un coach qui est à l’écoute et qui fait vraiment attention à moi. On a appris à se connaître la saison dernière et il a vu que je n’étais pas un tricheur. On a noué une relation de confiance.

Quid de ton sommeil ? 
Je suis obligé d’y faire attention. Il y a quelques années, quand je faisais une soirée, je pouvais me coucher à 6h00, me lever à 10h00, et être en forme toute la journée. Maintenant, si je fais ça, je sens la fatigue pendant deux-trois jours… Je n’ai plus les mêmes capacités de récupération, donc je suis obligé d’être sérieux. Même en restant à la maison, je ne peux plus veiller tard. Par exemple, j’aime bien jouer à la console, mais je suis obligé de me limiter pour ne pas compliquer ma récupération. J’essaie aussi de faire des siestes de manière régulière.

« Les croisés ? Si j’avais connu un parcours classique, Je pense que j’aurais abandonné… »


Le Pau FC enchaîne actuellement les matchs tous les trois jours. Est-ce que cela te demande une récupération différente ?
Pas du tout ! Je ne suis pas un joueur qui multiplie les courses à haute intensité, je suis plus un marathonien, donc ça me va très bien quand les matchs s’enchaînent. Les entraînements sont plus légers et cela me permet de conserver une certaine fraîcheur. Mais c’est lié à mon style de jeu. De toute façon, s’il était basé sur l’explosivité, je n’aurais certainement pas pu jouer aussi longtemps (rires).

Tu as été victime d’une rupture des ligaments croisés à 35 ans (en mai 2022), une blessure dont certains joueurs n’arrivent jamais à se remettre. Qu’est-ce qui t’a motivé à poursuivre à ce moment-là ?
La passion ! J’étais dans un très bon club, au Paris FC, où tout était fait pour me mettre dans les meilleures conditions pour ma rééducation. Le club et mes coéquipiers étaient toujours là pour m’accompagner. Je n’ai pas eu de petit coup de blues après ma blessure. Je savais que je n’avais pas tout donné, j’en avais encore sous le pied. J’avais plutôt un goût d’inachevé avec le club car on avait vraiment une belle équipe et un joli coup à jouer cette saison-là.
 

Le fait d’avoir commencé ta carrière professionnelle sur le tard a pesé ? 
Aussi ! Si j’avais connu un parcours classique, je pense que j’aurais abandonné… Je me serais certainement dit que j’avais assez donné. Mais, là, dans ma tête, c’était vraiment : « Reviens et ne lâche pas ». Je suis quelqu’un de fort mentalement, donc, à partir du moment où je me suis fixé l’objectif de revenir, je savais que j’allais réussir.

Comment as-tu fait pour revenir à un tel niveau ?
C’est vraiment grâce au Paris FC. Comme j’étais dans un environnement que je connaissais, que je connaissais les joueurs par cœur et que tout le monde connaissait mes qualités et mes défauts, tout est revenu naturellement. Quand tu as la confiance d’un club, d’un coach et d’un groupe, ça va tout seul !

« Si j’arrive encore à m’illustrer, c’est vraiment parce que je tombe dans des équipes où j’ai des joueurs pour m’entourer »


Tu n'as pas eu de difficultés ? 
Au début, bien sûr que si ! J’ai été aidé par mes capacités d’adaptation et de compréhension du jeu. Par exemple, même si ce n’était pas ma qualité première de faire des appels en profondeur, je me suis rendu compte que c’était désormais encore moins compatible avec mon corps, et je me suis adapté. Mais, de toute façon, j’ai toujours eu un style de jeu qui m’oblige à avoir des joueurs rapides autour de moi.

Et c’est le cas depuis plusieurs saisons !
Exactement ! Au Paris FC, j’avais Morgan Guilavogui, Alimami Gory, Lamine Gueye, Migouel Alfarela… J’étais bien ! A Pau, la saison dernière, j’avais Mons Bassouamina, Moussa Sylla, maintenant, j’ai Taïryk Arconte, Pathé Mboup, Kandet Diawara… A chaque fois, j’ai beaucoup de joueurs rapides, donc je sais que je n’ai pas besoin de faire des grosses courses. J’essaie d’en faire de temps en temps pour perturber les défenses, mais je sais que les joueurs autour de moi vont me faciliter la tâche.

Tu attribues donc vraiment ta réussite à tes coéquipiers ?
Oui ! Si j’arrive encore à m’illustrer, c’est vraiment parce que je tombe dans des équipes où j’ai des joueurs pour m’entourer. Ils me mettent bien, tout simplement. Si je n’avais pas ces flèches, ça serait plus compliqué, je ne marquerais pas autant. J’ai aussi des superbes passeurs cette saison avec Antoine Mille et Antonin Bobichon. Je n’ai vraiment pas à me plaindre !
 


Pour revenir à ta blessure, as-tu dû faire évoluer ta façon de préparer les rencontres ?
Sur ce point, au début, j’ai dû mettre en place une petite routine. Il fallait que je travaille la mobilité de mon genou. J’étais obligé d’effectuer des exercices pour le chauffer avant les entraînements et les matchs. C’est parfois encore d’actualité lorsque j’ai une petite douleur quelque part. J’ai conscience que la machine est plus longue à se chauffer qu’il y a quelques années.

Tu as parlé de l’évolution de ton jeu. Tu as donc senti qu’il était moins explosif après cette blessure et, plus globalement, au fil des années ?
Oui, c’est logique ! Avec l’âge, je savais que j’allais perdre en explosivité. La chance que j’aie, comme je l’ai dit plus tôt, c’est de ne pas être un joueur explosif de base. Par rapport aux croisés, les joueurs qu’on voit beaucoup galérer, ce sont ceux qui ont un jeu basé sur les changements d’appuis et les rotations. Dans ce cas-là, c’est 90% de tes qualités et malheureusement, après cette blessure, tu es diminué et tu perds ce qui faisait ta force. Moi, je ne suis pas dans cette catégorie, j’ai moins besoin d’être vif sur mes premiers appuis. Ce qu’il fallait, c’est que je retrouve mes qualités techniques et ça a été le cas. Je ne suis pas Zidane mais je me débrouille bien (sourire).

« Plus les années avancent, plus il faut savoir accepter de sortir plus souvent ou d’être remplaçant »


Est-ce que tu évites certaines choses sur le terrain ?
Non ! Quand je suis sur le terrain, je suis à 100%. Comme plus jeune, je presse de partout et je fais les choses à fond. Ce qui a changé, c’est que je ne peux plus faire 90 minutes à chaque match. On le voit en ce moment avec l’enchaînement de matchs qu’on traverse, je pense qu’à l’époque, j’aurais fait minimum quatre fois 90 minutes, maintenant, je sais que c’est impossible. Je dois me gérer et aussi l’accepter. 

C’est-à-dire ? 
Plus les années avancent, plus il faut savoir accepter de sortir ou d’être remplaçant. Ce n’est pas toujours simple au début puis ça devient une évidence. Je pars toujours du principe que le coach fait son équipe pour gagner. Il n’y a rien de honteux à sortir ou à débuter sur le banc. Après, par rapport aux autres joueurs de mon âge, je pense notamment à mon ancien coéquipier Anthony Gonçalves (39 minutes avec Laval cette saison), j’ai encore un très gros temps de jeu. 

En termes d’âge, de buts et de temps de jeu, ton plus proche concurrent est Malik Tchokounté (36 ans et 4 buts cette saison)…
(Rires) On a un peu le même parcours avec Malik ! C’est un joueur contre lequel je jouais déjà quand j’étais en amateur. Quinze ans plus tard, c’est marrant de se retrouver tous les deux en Ligue 2 BKT et de nous voir continuer d’essayer d’être des buteurs réguliers. Il y a un mois, on a joué l’un contre l’autre et on en a justement discuté. On a galéré ensemble et je suis content de le voir aussi performant. On a toujours plaisir à se retrouver.

As-tu toujours la sensation de progresser ?
J’estime que j’apprends encore tous les jours. C’est sûr que je ne progresse plus physiquement, mais tactiquement et techniquement, je continue d’apprendre de tout le monde. J’aime bien notamment aller discuter avec les gardiens et l’entraîneur des gardiens pour avoir des informations sur les gardiens adverses, connaître leurs points forts et faibles.

Tu n’éprouves jamais de lassitude ?
Ça peut parfois m’arriver mentalement. Sachant que je suis loin de ma famille, ça peut arriver que ça soit pesant. Mais ça va, pour le moment, je résiste encore. Dans ma tête, je me dis que ce sont mes dernières années, j’ai la chance de toujours jouer et il faut que je savoure à fond.

« Un décalage générationnel ? Je dois être celui qui fait le plus le con »


Qu'est-ce qui pourrait t’amener à arrêter ?
Tant que je prends du plaisir, je veux continuer à jouer. Je vois les choses année après année. Je suis en fin de contrat à l’issue de la saison, je verrai à ce moment-là. Ce qui est sûr et certain, c’est que je ne vais pas continuer à jouer pour jouer. S’il n’y a pas un projet qui m’intéresse, je m’arrêterais. Et, à l’inverse, si je trouve un projet intéressant, je me dirais pourquoi pas continuer. A voir !

Le groupe du Pau FC est assez jeune. Comment ça se passe pour se fondre dans un vestiaire composé de joueurs avec une moyenne d'âge de 25 ans ?
Je suis très jeune dans ma tête. On en rigole dans le vestiaire car mes coéquipiers aiment dire que je suis le plus jeune de l’équipe mentalement. Je n’ai aucun problème, il n’y a pas de décalage générationnel, il n’y a rien (rires) ! Je passe mon temps à rigoler et je dois être celui qui fait le plus le con. C’est pour ça qu’on me surnomme « Zinzin ». Je suis parfaitement dans l’air du temps. Si tu es dans ton coin et que tu ne te sens pas dans le même délire, je pense que ça peut te pousser à arrêter.

J’imagine qu’avec ton expérience, ta voix fait partie des plus écoutées dans le vestiaire, non ?
A fond ! Ce qu’il faut savoir, c’est que le coach a mis en place un conseil des sages. On est cinq, avec Ousmane Kanté, Johann Obiang, Xavier Kouassi et Mehdi Jeannin, et on a carte blanche pour nos prises de parole. Quand on parle, on a presque la même voix que le coach. Il nous a donné ce rôle pour tenir le groupe à ses côtés, donc on essaie de le faire bien vivre et de faire respecter un cadre.

Vous avez été nommés dès le début de la saison ?
Oui, il a mis les choses au clair directement en annonçant au groupe les cinq joueurs concernés. Il a expliqué que lorsqu’un des cinq prenait la parole, il fallait l’écouter et que c’était pour le bien de l’équipe. Le coach sait qu’on ne va pas abuser de ce rôle. On échange beaucoup avec lui. C’est ce qui est appréciable avec ce coach, c’est qu’on a beaucoup de proximité et beaucoup de confiance.

Vous faites donc des points avec Nicolas Usaï ?
Il y a des formes différentes. Ça peut être individuel, ça peut être à cinq et ça peut aussi être avec les capitaines (Bingourou Kamara, Jean Ruiz et Steve Beusnard) ou avec les jeunes pour les « former » à cela. Quand il se passe des événements importants, il convoque les cinq pour échanger, sinon ça peut être le premier des cinq qu’il croise. Par exemple, il me voit, on discute et il me demande mon avis sur un sujet ou il me demande de partager une info au groupe. C’est sans prise de tête, c’est ancré dans notre vie de groupe. 

« Maintenant, je sais que même si je marque 20 buts, je ne vais pas toucher des millions et je ne vais pas signer au PSG »


Vous abordez tous les sujets ? 
Tous ! Ça peut aller de : « Qu’est-ce qu’il s’est passé sur cette situation de jeu ? » à « Comment est-ce que vous voulez organiser le prochain déplacement ? ». Il est vraiment très ouvert et fait tout pour concerner tous les joueurs. Que ce soit les joueurs blessés ou moins utilisés, il veut les garder mobilisés. Il y a des joueurs qui ne sont pas dans le groupe pendant quatre ou cinq matchs et ils ne rechignent pas contre le coach. Il est exceptionnel humainement. C’est de la bombe !

Est-ce que les jeunes te sollicitent pour avoir des conseils ?
Ils n’ont pas besoin de le faire. Les conseils, je les donne naturellement au quotidien. Par exemple, Pathé Mboup va faire quelque chose, je vais aller l’attraper et lui glisser quelques mots. Je vais lui dire : « C’est très bien ce que tu as fait là, c’est exactement ce qu’on attend de toi », « Ce que tu as fait là, ce n’est pas bon », « Fais attention, le coach préfère un autre geste dans ce type de situations »…

Tu aimes aller voir les joueurs individuellement ?
Oui, je fais du cas par cas. Dans le groupe, on a beaucoup de caractères différents, et moi, je suis quelqu’un qui va voir les gens en privé. Je ne suis pas un joueur qui crie haut et fort devant tout le monde ou qui sait tenir des discours. En match, tu vas m’entendre parler, replacer, crier, mais, dans le vestiaire, tu ne vas pas m’entendre. C’est plutôt Johann Obiang et Mehdi Jeannin qui ont ce rôle de mobiliser tout le monde avant les matchs. Ils savent trouver les bons mots.

C’est un rôle que tu as développé au fil des années ? 
Oui car j’aime bien détendre l’atmosphère, calmer les gens et les remobiliser. Quand quelqu’un est dans le trou, je vais discuter et rigoler avec lui. Ça peut même m’arriver de prendre un joueur et de lui proposer d’aller manger ensemble pour parler tranquillement. C’est important de discuter d’autre chose que du foot. Je suis plus dans un rôle de grand frère.

Est-ce qu’on peut s’attendre à te voir atteindre la barre des 60 buts en Ligue 2 BKT cette saison ?
Bien sûr ! Tout est possible ! J’ai fait un bon début de saison. Je peux très bien connaître une période où je ne fais que marquer. Après, je ne suis vraiment plus dans le délire où il faut absolument que je marque à chaque match. A Strasbourg, j’étais vraiment un rat sur ça, il fallait que je marque dès que je pouvais, car j’étais en mission et je voulais aller chercher un gros contrat au vu de mon parcours. Maintenant, je sais que même si je marque 20 buts, je ne vais pas toucher des millions et que je ne vais pas signer au PSG. S’il y a des pénaltys, je les offre avec plaisir !

« je ne suis plus l’attaquant qui cherche à marquer et à tirer de n’importe où, si je peux donner le ballon, je le donne »


Tu préfères voir les jeunes joueurs s’épanouir ? 
Oui ! Quand j’étais au Paris FC, Morgan Guilavogui me disait toujours : « Tiens l’ancien, tire le pénalty ! » et je lui répondais : « Écoute ! Moi, je n’ai plus rien à gratter. Les stats, c’est important, donc il faut que tu marques dès que tu peux. » Aujourd’hui, mon plaisir, au-delà d’être performant et de gagner les matchs, c’est avant tout de voir progresser les joueurs offensifs qui m’entourent. J’essaie de les accompagner et de les aider à aller plus haut. Je ne dis pas que je suis responsable de la progression de tous les joueurs que j’ai côtoyés, ils ont eux-mêmes travaillé pour, mais j’y ai contribué à mon échelle.

Lequel as-tu le plus aidé ?
Je sais que j’ai contribué à l’éclosion de Morgan Guilavogui. Je lui parlais beaucoup et je faisais tout pour le mettre en confiance. C’était comme mon petit frère. J’étais trop content de le voir signer à Lens, de le voir en Ligue des champions et maintenant en Allemagne. C’est une fierté. Je continue de l’appeler pour prendre de ses nouvelles. Là, quand je vois Moussa Sylla à Schalke, c’est pareil. Quand il est arrivé à Pau, il était en terrible manque de confiance et il a réussi à repartir de l’avant en travaillant. Et d’avoir pu l’aider, ça m’a aussi fait plaisir. 

Tu lui as aussi offert des pénaltys !
Oui ! Quand Henri Saivet n’était pas là, je devais tirer les pénaltys, mais j’allais voir Moussa et je lui disais : « Moussa, s’il y a un pénalty, je sais que tu tires bien, il est pour toi. 9 buts ou 10 buts, ce n’est pas pareil. 14 buts ou 15 buts, ce n’est pas pareil. Il y a des paliers et il faut que tu marques le plus possible. » Comme je l’ai dit, je ne suis plus l’attaquant qui cherche à marquer et à tirer de n’importe où. Si je peux donner le ballon, je le donne. Parfois, c’est même abusé, il ne faut pas que je le donne, mais c’est comme ça. Ma fierté, c’est de voir Moussa Sylla à Schalke, Morgan Guilavogui à St. Pauli, Arouna Sangante capitaine au Havre... Je sais que je vais bientôt arrêter et ça va être mon plaisir de voir l’évolution des jeunes avec lesquels j’ai joué. 

Tu as encore quelques joueurs à accompagner cette saison !
Oui, j’espère pouvoir aider Taïryk Arconte, Kandet Diawara, Pathé Mboup, Yonis Njoh… Ces joueurs-là, je serais très content de les voir exploser. Ils ont des qualités ces jeunes ! Franchement, si j’arrête l’année prochaine ou dans deux saisons, j’aimerais trop pouvoir les regarder tranquillement chez moi en Ligue 1 ou en Ligue des champions. Ça serait un pur bonheur !

Pour résumer, en parallèle de l’évolution de ton jeu, ton rapport aux statistiques et au collectif a aussi évolué avec l’âge…
Je suis vraiment entré dans un rôle collectif ces dernières saisons. J’avais déjà cette manière de penser plus jeune, c’est simplement qu’à un moment donné, je faisais beaucoup attention aux stats car je savais que ça allait me permettre d’aller plus haut. C’est ce qui m’a ramené en équipe nationale et qui m’a permis de signer à l’étranger pour gagner un peu d’argent. Je ne vais pas le cacher, j’ai aussi fait ça pour l’argent. Il y a le plaisir, la passion, mais il y a aussi l’argent. Donc, c’est sûr qu’à Strasbourg, sans dire que j'étais égoïste, j’étais concentré sur moi et mon avenir. Si je pouvais marquer, je marquais. Les pénaltys, je ne les laissais pas !